Sunday, September 27, 2015

C'est



une chanson
que j'aimais écouter
il y a longtemps

Marlene
Marylin
dans plusieurs langues
j'aimais beaucoup ça

un texte qui dit
qu'elle craint le bonheur
car
s'il arrivait
le malheur pourrait lui manquer

je me sens loin de ce texte aujourd'hui
et je sais
oui je sais
que j'ai vraiment senti ça
en moi
il y a des années

la crainte
d'être séparée
de tout un tas de tristes idées
qui étaient en moi

le désir
de voir résolues des questions
mais pas trop vite
pas toutes à la fois

c'eût été
m'avait-il semblé
bien trop violent
d'avoir à changer ma façon de penser
trop rapidement

le chemin est long parfois
pour nettoyer sa propre pensée
accepter la joie


j'ai beaucoup aimé cette chanson
c'est sans doute
celle que j'ai le plus aimée

pas la première d'elle que j'ai chantonnée
puisque j'ai connu Lili Marlene
au cours d'allemand au Lycée

celle-ci me croisa lorsque j'avais 20 ans
dans une mise en scène
et cet air s'accompagnait d'un pas de danse
que nous effectuions à plusieurs

nous étions une bande de prisonnières
échappées d'une prison
nous dansions
dans des ruines imaginaires
sur cette chanson

la pièce s'appelait
Lovely Rita
de Thomas Brasch




il y avait aussi
J'ai sauté la barrière hop là
de Johnny Hess

qui définit si bien ce que je vis
aujourd'hui

puisque si la lourdeur s'empare de moi
et m'immobilise parfois de fatigue
mes idées sont
quant à elles
claires
là où elles furent longtemps si brumeuses
concernant mes choix

les choses se téléscopent parfois
j'avais commencé à répéter un spectacle en anglais
Passion, d'Edward Bond
et j'ai finalement d'abord joué dans deux autres spectacles
avant que le premier ne voie le jour

Karl Valentin m'a rattrappée
avec sa lettre d'amour
un monologue que je faisais en début de spectacle
assise en tutu romantique
immobile
sous un projecteur
tandis que les spectateurs entraient dans la salle
quand plus personne ne bougeait ou presque, je m'animais

et je lisais une lettre
incohérente
que j'aurais pu lire plus tard à diverses personnes
- je ne me connaissais pas encore
j'avais 20 ans j'étais petite
mais elle me définissait
sans que j'aie pu le pressentir
fichue lettre ! -

le monologue
c'est moi
si souvent
c'est mon sort

aimer s'exprimer en public
tout en étant timide
écouter les autres pendant des heures
et me retrouver seule pour écrire

tel est mon paradoxe

une scène que j'ai jouée des dizaines de fois
- en français en début de spectacle
en impro en allemand à la fin -
et la dernière fois
il y a 22 ans
avec une toute petite fille nouvellement arrivée
dans mes bras
qui participa aux improvisations
de fin de spectacle

maintenant
mes enfants ne m'écrivent pas
lorsque je leur écris

à leur tour
de me renvoyer du silence
puisque j'ai loupé un coche
puisque j'ai commis des maladresses

puisse cette douleur
s'apaiser
comme toutes les autres
et devenir si légère
et ne plus me mouiller immanquablement les yeux
lorsque j'y pense

ils sont nés de ça
de ces spectacles
éclairages
de ces voyages improbables
en camionnette
à travers l'Europe

il y a encore des barrières à passer
mais faut-il que je cesse d'écrire
pour parvenir à dialoguer ?
l'un exclut-il forcément l'autre ?

comme on se parlait difficilement chez moi
le soir
je m'épanchais dans des cahiers

alors j'ai appris ça
le dialogue sur du papier

ça n'aide pas franchement
dans les situations courantes
et je vois
tout autour de moi
tout plein de gens
qui se sortent admirablement
de situations dont je ne me sors pas

parce que j'ai trouvé refuge
dans des cahiers
à l'âge où l'on apprend l'art du dialogue

je n'ai pas connu l'alcool
ou la drogue

juste des mots
sur une scène
qui me faisaient virevolter

et ces voyages
la vie de troupe
avec parfois des personnes compliquées à supporter
- et vice-versa -
furent une merveilleuse école

oh il n'y a pas de document officiel pour attester de tout cela
de vieux programmes
quelques photos
des phrases qui reviennent parfois

tel pays traversé avant que la guerre n'y éclate
telle ville avant que la terre y trembla
des visages qui ne revinrent pas en festival

pourquoi écrire ça ce soir ?
parce que j'aime profondément les paradoxes






Sunday, September 13, 2015

J'ai



fait
un rêve
cette nuit

j'étais enceinte
et sur le point d'accoucher

je n'étais pas la seule d'ailleurs
mais pour moi
c'était le moment

il allait sortir
ce MOT

car j'accouchais d'un mot
je l'ai compris au réveil

et il n'y avait pas de sage-femmes ici
capables de m'accompagner
pour laisser paraître ce mot
de moi
à la surface

il fallait que j'aille ailleurs
pour cela

il y en avait

voilà ma vérité
les enfants
et les mots

nous les femmes sommes là pour ça

en même temps
je devais tourner une vidéo
mais je pleurais beaucoup

rien n'était en place
et puis ça a tourné quand-même

Wednesday, September 09, 2015

Vivre



“These then are some of my first memories. But of course as an account of my life they are misleading, because the things one does not remember are as important; perhaps they are more important.”
― Virginia Woolf, Moments of Being



voir arriver la mer devant soi
grande
qui vous dépasse

se souvenir
subitement
avoir traversé
des tempêtes
et des plaines

recevoir cette fougue
se mettre en position
pour l'accueillir

accepter
remercier
qu'elle soit là

oui
car cette mer
nettoie
et enlumine
ce qu'elle traverse

j'aime ça

Monday, September 07, 2015

Merci


d'envoyer
de la paix
à tous mes poussins

Journée

photo Florent Sluys
apaisante
où l'on sort toute la cargaison
ou presque
de porte-bébés qui restent
dans ma maison

où tous les duplos roulent sur le tapis
à côté des puzzles
des canards à roulettes
et que 
de leur côté
les Playmobils plongent dans la piscine
en glissant sur le toboggan

journée 
douce
journée normale
au rythme de la sieste
et des tétées d'un tout-petit

journée
pour rire
et pour danser aussi

Saturday, September 05, 2015

Spécial

fête

ce jour

la smala
van den Peereboom
se réunissait
pour fêter l'un des siens
qui a quatre fois vingt ans aujourd'hui

et comme souvent
il a célébré une messe
- puisqu'il est prêtre -
pour nous tous assemblés

tous les cousins n'étaient pas là
mais beaucoup beaucoup

c'est lui qui nous a presque tous baptisés
ou mariés

c'est avec lui que j'aime parler étymologie
car il fut prof de latin-grec

j'ai beaucoup aimé ce moment
dans une grange de Rixensart changée en église
dans laquelle j'ai des souvenirs d'enfant
de messe de minuit
sous la neige épaisse

je ne sais pas ce qui a pris à mon oncle aujourd'hui

j'étais arrivée un peu en retard
avec les petits d'entre mes petits

plein de rôles avaient été répartis
ceux qu'il appelle affectueusement des petits canaris
petits neveux et nièces
l'aidaient chaque fois qu'il le leur demandait

des cousines, mon petit frère avaient des lectures prêtes
des chants et des musiques à interpréter
avec une grande douceur

et voilà qu'arrivé à l'évangile
il demande si quelqu'un a envie de le lire pour lui
et ma main se lève toute seule

j'y vais
je lis
fort
posément
en faisant de nombreuses pauses
comme j'aime

un petit cousin tient un grand cierge à ma gauche
il fait ça très sérieusement 

plus tard
mon oncle me remercie d'avoir fait cette lecture
je réponds : avec plaisir
il me dit : j'ai vu !

oui
c'est un grand plaisir
et j'ai même mangé du gluten à la messe
et je me suis dit zut !

ça m'arrive une fois par an à peu près
je n'éprouve plus le besoin de faire partie d'une assemblée comme il y a longtemps

parce que nous sommes chacun sur notre chemin à bien des moments particuliers
la spiritualité est si personnelle
les textes si nombreux

je n'éprouve plus le besoin d'une organisation
pour le ressenti de mon coeur qui bat
qui sent
qui frémit

mon coeur s'organise tout seul

pourquoi ai-je lu ?
est-ce qu'il faut justifier le plaisir ?

je crois surtout qu'il se partage

j'apprends à recevoir des cadeaux

 

Friday, September 04, 2015

Une

journée
pour prendre l'air
largement

faire le tour des endroits qui me font vraiment du bien
et
en sortant de chez Pêle Mêle
m'éclater
le front et le genou gauche en plein dans la porte vitrée

me retrouver dans les bras d'une dame
les yeux fermés
rire les yeux fermés
l'entendre dire qu'elle croit
que je n'ai rien

je lui dis que
si
j'ai mal
mais je ris

remonter m'affaler dans un fauteuil orange en skaï
recevoir des glaçons d'un gentil libraire
me détendre
et me rappeler que demain
je fais des photos
(et que donc ce sera super !)

je sors
la pharmacie juste à côté a de l'arnica
j'en prends une forte dose

et ce soir
j'ai la bosse au front

le plus drôle c'est que
deux minutes plus tôt
juste avant de passer à la caisse
j'avais visualisé des clous qui s'enfonceraient utilement
tout autour de mes semelles de chaussures
dans le sol
afin de garantir mon contact avec ce sol justement

et paf
voilà mon voeu exaucé
en quelque sorte

je suis restée sur place
un moment

ça ne m'a pas empêchée
ensuite
d'aller faire un tour
de robe-thérapie
dans une rue que j'aime
et où j'en trouve souvent que j'apprécie

de mieux en mieux
de retour dans ma ville
j'ai rencontré mon neveu
pour la toute première fois !

j'ai mangé avec ma maman, mes frères, ma belle-soeur
pendant que mes neveux jouaient

ça n'était arrivé depuis des années
en cette configuration : jamais

j'ai beaucoup aimé cette journée
au cours de laquelle j'ai respiré
donc écrit aussi

il est des jours
où je me rencontre

c'est étrange

et ça me fait du bien que l'on rie de moi
quand les mots dansent
à l'intérieur