Sunday, November 25, 2007

16 ans

il éclate de rire
il m'invite
à venir voir
avec lui
la fin d'un feuilleton

je m'étonne
et m'exécute

et j'écoute
les répliques
qu'il souligne
en me les répétant

chapelet de poncifs
qu'égrène cet épisode
d'un feuilleton américain
exclusivement WASP
ou presque
des années cinquante

ou

(c'est lui qui me le dit)
comment voir la vie en
compliqué
et en bons sentiments


je suppose que
dans pas longtemps
il regardera plus
la mise en scène
que l'histoire

les plans où les acteurs
parlent sans rien faire
ou font sans rien dire

est-ce que ça l'énervera
comme ça énerve son papa?

j'aime ce décalage
pas désabusé
amusé
rieur
chez mon fils,
notre fils

à qui nous n'avons pas essayé
de faire gober trop d'évidences
mais bien mieux
de toujours regarder
si les choses simples
ne sont pas, de plus près,
plus complexes qu'elles ne semblent

complexes, belles, changeantes, intéressantes

déjà, il était revenu
riant
d'un voyage
où on lui avait dressé des vues sur la vie
pareilles à des recettes
il m'avait fait son analyse
synthèse fine et circonstanciée

il sait que la vie c'est plus riche que des sentences

que les personnages de la vie sont ronds
pas plats comme des omelettes fades
qui rampent sous les mots.

Friday, November 09, 2007

libération?

Merci Cécile pour ce mot juste et merci à une "adulte intense"
qui m'a ouvert les yeux sur cette qualité d'une part,
et sur son acceptabilité d'autre part.

Pleurer dans le genre "chutes du Niagara" ou rire uniquement à gorge déployée
être à peu près totalement incapable de fermer les yeux le jour
(sauf en cas d'épuisement phénoménal ou de grossesse)
ou de faire la grasse matinée sous la couette
toujours être en mouvement, en réaction

travailler le jour
et travailler la nuit

ne pas savoir ce que le terme "pause" veut dire
ou alors "pause forcée"
quand les forces s'en sont allées

une nature intense

la libération pour moi fut qu'une personne m'ait nommé cette condition
que nous partageons...

Depuis, je suis légère.
Je me sens autorisée à être comme je suis.
Je peux comprendre - sans avoir plus envie de poser une foule de questions sur le passé -
que mes proches n'y aient souvent pas compris grand chose.
Depuis, je pense que le sentiment que j'avais eu longtemps de ne pas être pleinement acceptée telle que j'étais devait être légitime. Point.

Ca cicatrise à vitesse grand V, cette légitimation.


Une trop grande sensibilité qui fait que, le soir, au lieu de me coucher, je couchais, je couche des mots dans des cahiers, sur un clavier, ou que je dépensais tout mon argent de poche en pots de peinture - qu'allait-on bien pouvoir faire de moi? Hein?

Feu un de mes grands-pères m'a dit un jour que j'étais trop sensible.
Je me souviens, le jour de son enterrement, j'étais très loin, très loin de là, à donner une formation au portage, pour transmettre quelques gestes, quelques mots qui, à leur tour, voyageraient. C'était bien comme ça.

Ils l'ont enterré, au printemps, sous la neige.

J'aurais été bien incapable d'une oraison funèbre.
Trop tôt pour moi pour prononcer devant une assemblée
(ce que j'avais fait avec joie pour son épouse, ma grand-mère, quelques mois plus tôt)
des mots doux pour parler de non-douceur,
d'amour qui ne sait que taquiner et faire pleurer les femmes.
Il m'a aussi dit un jour que j'étais une bonne laitière, et il m'a fait rire.
Ses bêtes n'avaient pas le temps d'allaiter leurs petits.
Pas le temps pour ces choses, pour l'essentiel...
Chez lui, les heures de biberon des bébés étaient calculés pour que les hommes soient servis à l'heure où ils le voulaient.
Fallait que ça roule. Et ça roulait.
J'ai pourtant le souvenir d'une toute petite fille qui le faisait danser,
grand-père devenu gâteau avec les années.
Qu'ils étaient beaux, tous les deux, en train de faire la ronde.
Les petites filles de deux ans ont tout pour vous faire fondre.

Moi, j'ai eu le tort de le faire grand-père pour la première fois,
puis arrière grand-père pour la première fois,
et il a eu à chaque fois bien du mal à passer le cap.
Il semblerait que je sois un cap difficile à passer...


J'ai perdu cette année-là ma confiance dans le mot "famille".
J'ai vu, une fois de plus, le froid qui se lève sur le nid éparpillé
lorsque la Mère est partie.
Pendant des mois, j'ai eu peur de ce froid qui s'était levé.

J'ai compris, de chaque côté, que lorsque la Mère s'en va, sa tendresse ne reste pas forcément.
La Mère, la Grand-Mère, qui vous aime comme vous êtes, même si elle ne vous comprend pas, même si elle vous passe la main devant les yeux lorsque vous rêvassez, qui vous emmène à la messe à 7h du matin et avec qui vous faites les courses, bras-dessus-bras-dessous, pendant les vacances, cette Grand-Mère qui ne vous demande rien sinon d'être heureuse, parce que ses rêves à elle, elle sait très bien que ce sont les siens,
Grand Mère qui s'émerveille tout simplement devant vos pas, quels qu'ils soient ...

J'ai eu bien froid cette année-là.
La même année, mes poussins ont perdu leur Grand-Papa.
Curieuse année où mes enfants et moi perdons un ou deux de nos grands-parents.

Curieuse année où une petite fille nous est née, en plein été, coiffée, à la maison, après quatre garçons.

Il y a des années,
il y a des mots
qui changent beaucoup
surleur passage.

Sunday, November 04, 2007

Recherches dans le noir

Auriez-vous l'idée de faire des recherches dans le noir pour faire des économies d'électricité?
Eh bien, allez y voir...
Spirou m'en a parlé (il est d'ailleurs sorti sur papier recyclé, vous avez vu?) .
Je cesse de googler, je vais désormais blackler sur www.blackle.be .
Puis j'ai reçu mon numéro de Mothering sur papier recyclé, lui aussi...
(Sur www.mothering.com , vous pouvez vous abonner à la version internet, si vous pensez beaucoup aux arbres...) Ce magazine est superbe.
J'ai lu dans un journal imprimé sur papier pas recyclé que mes grands-parents lisaient lorsqu'ils étaient encore de ce monde que la lecture des sept tomes de Mister Harry Potter pouvait constituer une thérapie sur la sortie de l'enfance. Est-ce grâce à la lecture du septième tome en juillet (précédée de celle des six autres, un par un, dans l'ordre, et dans la langue) que je me sens bien à présent? Mystère... et boule de gomme! Aurais-je enfin cessé de chercher dans mon miroir d'Erised ce que j'ai tout au fond de moi: une solide capacité à accepter mon sort, mon jonglage avec l'intensité qui fait vibrer mon quotidien, du rire aux larmes, de la paix à la rage. Me recyclerais-je enfin?

A moi, la nuit, non pas les troubles du paradoxal loup garou gentil, mais plutôt, pour l'instant, les joies de la lecture de Tobie Lolness, hélas en deux volumes seulement!

Et de l'écriture, pour un mag que j'aime, qui est, lui, imprimé sur papier recyclé depuis le début: www.grandirautrement.com .

A nous les joies du recyclage d'une maison (aurons-nous un jour terminé? peut-être lorsque les enfants seront tous grands?) On ne s'improvise pas fourmi quand on est une cigale; on ne s'improvise pas sédentaire lorsqu'on est nomade par essence.

Savez-vous que les nomades ne sont pas ceux que l'on croit? Que les sédentaires sont plus mouvants qu'eux, qu'ils quittent souvent leur région d'habitation pour partir s'établir très loin du lieu qui les a vu naître, tandis que les soi-disant nomades reviennent régulièrement aux mêmes endroits, sur de vastes étendues. Ils ont une foultitude de repères et connaissent les moindres recoins des régions qu'ils arpentent encore et encore. Ils épuisent moins les ressources de la terre.

A nous de nous recycler sans cesse, d'apprendre chaque jour de nouvelles petites choses.
Je me demande juste si ce post a un sens. Je cherche... souvent je tournicote et je cherche encore; la balade vous plaît?